Charles Darwin a émis l’hypothèse que l’évolution des espèces résulte de mutations – autrement dit, comme on l'a compris plus tard, de modifications de gènes ou d’arrangements de gènes – intervenues de façon aléatoire et sélectionnées ultérieurement parce qu’elles rendent les individus qui les portent plus aptes à assurer leur descendance.
Cette théorie a été largement, bien qu’incomplètement, validée par les développements ultérieurs de la science. Qu’il y ait des mutations est une certitude. Les mécanismes selon lesquels elles sont sélectionnées dans la nature font encore l’objet de controverses.
Toutes les espèces, sauvages ou domestiques, toutes les variétés végétales et toutes les races animales, aujourd’hui présentes sur terre, sont donc issues, d’une façon ou d’une autre, de mutations.
Dans la nature, une mutation peut provenir soit d’un accident purement aléatoire de réplication des gènes, soit des effets d’un rayonnement ionisant ou d’un produit chimique, qu’on dit alors mutagène.
La sélection, non plus naturelle, mais exercée par l’homme, visant à l’amélioration des végétaux et des races animales, est aussi vieille que l’agriculture et que l’élevage. Elle remonte donc à environ une dizaine de milliers d’années.
Pour simplifier, les techniques de la sélection reposent sur quelques principes simples.
La sélection massale
Dans une récolte, on réserve pour le semis suivant les grains qui présentent les caractéristiques recherchées – grains plus gros, plus riches, plus secs, etc. – ou issus de plantes dont les caractéristiques sont recherchées – paille plus courte donc plus résistante à la verse, fruit plus sucré, plus gros, plus coloré, etc.
Le croisement et l’hybridation visent à obtenir un produit mariant les qualités de deux parents, par exemple, rendement et résistance aux maladies, etc.
Ces deux techniques sélectionnent, sans bien savoir, les caractéristiques issues de mutations naturelles, intervenues au hasard et au fil des générations précédentes.
C’est pourquoi, en production végétale, les sélectionneurs ont entrepris, il y a une cinquantaine d’années déjà, de provoquer des mutations par radiations ionisantes ou par des substances chimiques mutagènes. Il s’agit d’accélérer le processus de mutation au hasard, puis de sélectionner, dans la mesure où on en a obtenu, les produits présentant les caractéristiques recherchées.
C’est la technique qu’on appelle mutagénèse.
Aujourd’hui, on peut dire qu’il n’existe presque aucune semence, en agriculture conventionnelle ou en agriculture biologique, qui ne soit issue de la mutagénèse pratiquée sur une génération plus ou moins ancienne.
Il y a une autre technique d’amélioration des plantes, plus récente, couramment employée dans le monde entier, sauf au pays d’Astérix et dans un ou deux autres pays aussi réactionnaires : la transgénèse.
De quoi s’agit-il ?
C’est une technique qui, dans ma jeunesse étudiante, il y a des lustres, était utilisée dans les laboratoires à des fins de recherche comme, par exemple, l’étude des phénomènes d’antibiorésistance. Aujourd’hui, depuis une quinzaine d’année seulement, elle est utilisée commercialement pour l’amélioration des végétaux.
Cette technique consiste à injecter, par des techniques de laboratoire assez sophistiquées, dans le génome d’une espèce, un gène d’une autre espèce, gène codant une caractéristique recherchée.
Par exemple, on injecte à des maïs le gène d’une bactérie dénommée Bacillus thuringiensis, qui code une protéine mortelle pour certains papillons. Les maïs ainsi modifiés sécrètent cette protéine et deviennent résistants à un de leurs principaux ravageurs, la chenille d’un papillon qui s’appelle la pyrale. C’est ainsi qu’on parle de maïs Bt (Bt pour Bacillus thuringiensis, c’est plus court !)
Pourquoi, dans la pratique, n’utilise-t-on la transgénèse que pour l’introduction d’un gène d’une espèce différente ? Parce qu’introduire dans une variété un gène d’une autre variété de la même espèce par les techniques classiques de croisement ou d’hybridation est moins coûteux.
Dans la vie courante et dans les textes réglementaires, on réserve le mot OGM (organismes génétiquement modifiés), ou encore plantes GM, aux produits issus de la seule transgénèse. Pourquoi ? Parce qu’en science on essaye de donner un nom distinct à des processus ou à des techniques différentes et que cette distinction a été reprise par les juristes, qui s’essayent eux aussi à parler clairement, et que cela est passé dans le langage commun.
Bon, tout cela peut vous paraitre un peu compliqué.
Mais si vous avez compris que :
mutagénèse et transgénèse sont des techniques bien différentes, que la première est utilisée commercialement depuis cinquante ans, que beaucoup des produits d'origine végétale que vous mangez en sont issus, que la seconde n'est sur le marché que depuis quinze ans et qu'elle a été diabolisée par les écologistes, qu’entre gens de bonne foi le mot OGM désigne uniquement des produits issus de cette dernière,
alors vous comprendrez facilement mon prochain article !
C'est tout pour aujourd'hui !
Suite au prochain numéro.