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7 janvier 2010 4 07 /01 /janvier /2010 22:55



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L’utilisation des pesticides organochlorés, et plus particulièrement de l’un d’entre eux, le chlordécone, a été intense aux Antilles françaises.




DSC01389Le chlordécone a été utilisé contre le charançon du bananier. Les risques de ces produits pour la santé, ainsi que leur grande persistance dans l’environnement ont entrainé des restrictions d’emploi à partir de 1969, puis leur retrait définitif. Le chlordécone a été définitivement interdit aux Antilles en septembre 1993.



Hopital Georges Pompidou
Dans Le Parisien du 17 septembre 2007 une interview du professeur Dominique Belpomme, cancérologue ayant exercé à l'hôpital Georges-Pompidou, très engagé dans la cause écologique, faisait l’effet d’une bombe.




img050Ayant conduit une mission à prétention scientifique à la Martinique, à propos de la pollution par les pesticides, il n’hésitait pas à déclarer : « La situation est extrêmement grave ! Les expertises scientifiques que nous avons menées sur les pesticides conduisent au constat d'un désastre sanitaire aux Antilles. Le mot n'est pas trop fort : il s'agit d'un véritable empoisonnement de la Martinique et de la Guadeloupe ». 

« Je pense que cette affaire se révèle être beaucoup plus grave que celle du sang contaminé. Cette fois, c'est toute une population qui a été empoisonnée : celle qui vit aujourd'hui, mais aussi les générations futures. »


Sans titre - 1
« Le taux de cancers de la prostate y est majeur : les Antilles sont au deuxième rang mondial ».
« Tout cela est scientifiquement établi, mais nous n'avons pas encore la preuve épidémiologique que les cancers de la prostate sont liés au chlordécone ».




logINLe lendemain 18 septembre 2007 l’Institut national de veille sanitaire (INVS) publiait un communiqué, dans lequel on pouvait lire :

Du fait de leur rémanence, ces [pesticides] sont toujours présents dans les sols et les habitants des Antilles peuvent être exposés par voie alimentaire principalement. Ceci a conduit l’Institut de veille sanitaire à s’intéresser à ce problème depuis plusieurs années.

(…)

Sans titre - 3A ce jour, aucun lien n’a été démontré entre l’exposition aux pesticides aux Antilles et les observations sanitaires qui y ont été effectuées : la plus grande fréquence absolue du cancer de la prostate aux Antilles par rapport à la métropole peut être expliquée par l’origine ethnique de la population (facteur de risque bien documenté aux États-Unis).

 

L’Institut indique que plusieurs études sont en cours concernant le lien possible entre les pesticides organochlorés et diverses pathologies.


rapport belpomme

Le même 18 septembre 2007 à l’Assemblée nationale le Professeur Belpomme donnait une conférence de presse présentant son "rapport". Après différentes rencontres avec des responsables des Ministères de la Santé et de l’Outre Mer, le Professeur Belpomme a été personnellement auditionné le 7 novembre 2007 par la Commissions des Affaires économiques de l’environnement et du territoire de l’Assemblée Nationale.





Du fait de l’émotion soulevée par cette agitation médiatique, l'Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) a été saisi, en octobre 2007, de deux demandes d’avis concernant cette question, l’une de la commission des Affaires économiques, de l'environnement, et du territoire de l'Assemblée nationale l’autre de la commission des Affaires économiques du Sénat


rapport OPECST synthèseLe rapport remis le 24 juin 2009 par l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques fait le point de la question en 223 pages. Ce rapport se montre très sévère avec les gesticulations et l’absence totale de rigueur scientifique du professeur Belpomme.

On y lit :

Dans un article publié récemment dans l’« International Journal of Oncology », le Pr. Belpomme affirme que le taux de croissance du cancer de la prostate augmente plus vite en Martinique qu’en Métropole. En réponse, les scientifiques travaillant sur ces questions font valoir que la méthode de calcul employée par le Pr. Belpomme pour établir cette progression (…) n’est pas reconnue (…). Et qu’en employant les méthodes reconnues par la communauté scientifique, on obtient des évolutions comparées proches : 5,33 % sur la période 1978 – 2000 pour la métropole, et 5,65 % sur la période 1981-2000 pour la Martinique.

Et plus loin :

« Il est quand même surprenant que le Pr. Belpomme ait refusé d’être auditionné par vos rapporteurs, arguant du fait qu’il était déjà venu deux fois devant la Commission des Affaires Économiques de l’Assemblée Nationale en 2005 et en 2007. Il nous a même écrit qu’il ne s’occupait plus de ce sujet, alors que, dans les mêmes jours, en mars 2009, l’article cité précédemment dans le "Journal International Of Oncology" était publié ».

Et encore :

header-logo-lp« Il est quand même singulier que les médias aient donné sur ce dossier la parole quasi exclusivement à certains, alors que les scientifiques de l’INSERM, de l’INVS, de l’AFSSA ont toujours opposé des démentis aux affirmations du Pr. Belpomme. »


logINLast but not least, une des études en cours en 2007 a été rendue publique en septembre 2009 par l’INVS et l’Association martiniquaise pour la recherche épidémiologique en cancérologie.


carte pollution des solsIntitulée « Étude de la répartition spatiale des cancers possiblement liés à la pollution des sols par les pesticides organochlorés, en Martinique » cette étude s’appuie sur les données consignées de 1981 à 2000 au registre des cancers de la Martinique, un des plus anciens de France. Elles ont été rapprochées de  la cartographie des zones potentiellement polluées par la chlordécone, établie par le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM). Les cancers retenus pour l’étude l’ont été sur la base d’une analyse bibliographique des cancers dont la survenue pouvait être liée à une exposition aux pesticides tant chez l’adulte que chez l’enfant.


carte couleur2Les conclusions de l’étude sont que, pour tous les cancers étudiés autres que le myélome multiple, aucune relation spatiale entre incidence et degré de pollution n’a été mise en évidence. Les résultats doivent être interprétés avec prudence compte tenu des données utilisées mais ils permettent de conclure à l’absence d’épidémie de cancers en rapport avec les pesticides organochlorés en Martinique « comme cela a pu déjà être déclaré dans les media ».

NB. Concernant le myélome multiple seule l’exposition professionnelle est mise en cause, dans des proportions qui n’ont rien à voir avec une sur-morbidité importante : « Au total, (…) le risque attribuable dans la zone 4 [la plus exposée aux pesticides] lié à ce type d’exposition [professionnelle] au cours des années précédentes pourrait s’être traduit par un excès de 12 cas de myélome multiple sur une période de 20 ans (1981-2000) »


logALa leçon que j’ai retenue de cette affaire, pour ma gouverne personnelle, est que lorsqu’à l’avenir j’entendrai le Professeur Belpomme à la radio ou à la télé, ou un porte-parole de l'association qu'il préside (Association de Recherche Thétapeutique Anti-Cancéreuse, ARTAC) je pourrai baisser le son et vaquer tranquillement à mes occupations.



Bibliographie

Le Parisien, interview du Professeur Belpomme du 17 septembre 2007

Communiqué de l’INVS du 18 septembre 2007

Rapport du professeur Belpomme  au nom de l’Artac

Rapport de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques du   2009

Synthèse du rapport de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques

INVS, Étude de la répartition spatiale des cancers possiblement liés à la pollution des sols par les pesticides organochlorés, en Martinique



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commentaires

P
En 2019. A votre avis, les informations données dans cet article de France-Info sont-elles fausses ?<br /> https://www.francetvinfo.fr/monde/environnement/pesticides/cinq-questions-sur-le-chlordecone-le-pesticide-qui-a-empoisonne-les-antilles-pour-plusieurs-siecles_3718375.html
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Y
Merci. Continuez à démonter les grosses ficelles des marchands de peur !!
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T
<br /> Vous oubliez de dire qu'en 2010 est sortie l'étude Karuprostate4 qui a confirmé les dires du Pr Belpomme.<br /> <br /> Un jour nous mourrons tous d'un problème de règle de calcul...<br /> <br /> <br />
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L
<br /> <br /> Il est tout à fait inexact de prétendre que l'étude Karuprostate 4, dont on peut lire ici-même un résumé par les auteurs, confirme les dires du professeur Belpomme.<br /> <br /> <br /> Cette étude confirme une chose dont on se doutait : l'exposition au chlordécone est un facteur de risque du cancer de la prostate. Ce facteur de risque n'est constaté que pour certaines<br /> catégories de la population (antécédents familiaux et séjour d'au moins un an dans un pays industrialisé) et seulement en cas de forte exposition des personnes de ces catégories.<br /> <br /> <br /> Cette étude ne confirme en rien la catastrophe sanitaire annoncée par le professeur Belpomme à grand son de trompettes de l'Apocalypse.<br /> <br /> <br /> <br />
C
<br /> Il ne s'agit pas d'être pour ou contre le Pr. Belpomme. Il nous appelle à réfléchir sur des productions agricoles qui, par leurs multiples traitements, portent des germes préjudiciables à notre<br /> santé.<br /> La France par la PAC a bénéficié d'un budget égal à 50% de l'UE, pour devenir une puissance agricole. Or les sols et les eaux appellent à de plus en plus de prudence quant à l'exploitation ou à la<br /> consommation.<br /> L'affaire des algues vertes, des lisiers polluant les eaux de source au point d'atteindre des cours d'eau du centre de la France, doivent nous alerter sans être un écolo mordu.<br /> Les médecins sont non à écouter béatement (affaires multiples..) mais pour ceux qui se posent questionnement, des hommes tout aussi fiables que les économistes. J'oublie sciemment les politiques!!!<br /> <br /> <br />
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L
<br /> <br /> Permettez-moi de ne pas être d'accord avec votre point de vue à propos du Professeur Belpomme. Le professeur Belpomme ne nous a pas appelés à réfléchir sur des pratiques agricoles susceptibles de<br /> nuire à la santé, il a affolé toute une population et des responsables politiques par des affirmations infondées. Ce n'est pas tout à fait la même chose.<br /> <br /> Concernant les pesticides je vous propose aussi les deux articles de ce blog :<br /> <br /> Pesticides, le chiffre du jour<br /> <br /> Non, les<br /> produits alimentaires conventionnels ne sont pas « bourrés » de pesticides<br /> <br /> Concernant les nitrates, les articles classés dans la catégorie Nitrates<br /> <br /> Enfin, en ce qui concerne les lisiers polluant les eaux jusqu'au centre de la France, je ne vois pas de quoi vous voulez parler. Une référence plus précise ou un lien vers un article serait utile<br /> pour prendre connaissance de ce sujet.<br /> <br /> Merci de votre contribution.<br /> <br /> <br /> <br /> <br />
L
<br /> Je pensais que le film "Nos enfants nous accuseront" n'était jamais sorti, à la suite de la dénonciation des grossières falsifications de prises d'images que j'ai constatées en le visionnant à<br /> plusieurs reprises. Je n'en avais plus entendu parler par la suite.<br /> S'il est sorti en salles, les spectateurs citadins n'ont pas trouvé malice à ses images cousues de vert fluo. Dommage!<br /> <br /> <br />
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