Les idées d'un blogueur politiquement incorrect. Comment pourrait-il en être autrement, je suis un vieil humaniste kantien et qui dit kantien, dit con et réac !!! Histoire des idées, épistémologie, progrès technique, agriculture intensive, distinction homme/animal, réchauffement climatique, religion et science, etc. : ce blog n’épargne aucune des bienpensances de notre monde postmoderne idéologiquement formaté par l’émotion médiatique.
Dans sa contribution au rapport de l’Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques dont j’ai parlé dans mon article du 29 mai dernier, le groupe animé par les Professeurs Maurice Tubiana, André Aurengo et Paolo Boffetta a abordé cinq questions.
Après l’impact sanitaire des pesticides, je résumerai ici la façon dont les auteurs envisagent les deux questions qu’ils abordent ensuite.
Peut-on se passer des pesticides ?
La nécessité de protéger les cultures de leurs ennemis est aussi ancienne que l’agriculture elle-même.
En effet, les ennemis des cultures sont très nombreux : champignons, bactéries, virus, arthropodes, nématodes, oiseaux, rongeurs, mollusques, mauvaises herbes, etc. Ils sont susceptibles de diminuer fortement les récoltes et d’en altérer la qualité.
Le rôle des produits de protection est de diminuer l’impact de ces agressions. À ce jour, aucune agriculture développée dans le monde, y compris l’agriculture biologique, n’a réussi à s’en passer.
Les produits de protection des cultures, moyen moderne de cette lutte pour la vie, constituent un ensemble très varié de substances chimiques ou d’agents biologiques. On peut les classer selon leurs fonctions (fongicides, insecticides, herbicides…), selon leur nature chimique (substances minérales, organométalliques, organiques…), selon leur mode d’élaboration (extrait végétal, mimétique de substance naturelle, produit de fermentation, chimie de synthèse…) etc.
Cette extrême diversité de nature et de fonction vide de son sens toute critique globale a priori. Il n’y a pas de corrélation entre l’origine de ces substances, leur toxicité ou leur écotoxicité.
Aujourd’hui, une substance n’arrive entre les mains de l’utilisateur que dix à douze années après sa découverte, délai minimum nécessaire à la réalisation d’une longue série d’études concernant l’homme et l’environnement. Ces précautions mettent les consommateurs à l’abri d’intoxications chroniques. Néanmoins la manipulation est l’épandage de ces substances ne sont pas anodins pour l’applicateur.
La population mondiale qu’il faudra nourrir passera de 6,5 milliards d’habitants aujourd’hui à 9,5 milliards avant 2050. Il faudra accroitre encore plus rapidement la production alimentaire, afin de mieux nourrir une fraction importante de l’humanité actuellement sous-alimentée et éviter de mettre en culture trop d’espaces vierges. Cela implique non seulement le maintien de rendements élevés mais leur augmentation sur les terres déjà cultivées.
Or, sans pesticides les rendements diminuent fortement. En effet les pesticides préservent de chutes de rendements allant de 20 à plus de 50 %. La protection des cultures est déterminante pour rentabiliser les investissements (semences, engrais, machinisme, irrigation, main d’œuvre…) nécessaires pour accroître la productivité.
Quelles seraient les conséquences d’une diminution de 50% de l’utilisation des pesticides en France ?
Un des objectifs assignés par le Grenelle de l’Environnement est de diminuer de 50 % l’usage des pesticides dans un délai de dix ans.
La mise en œuvre d’une directive européenne de 1991 a déjà éliminé bon nombre des 984 substances qui existaient dans l’UE en juillet 1993. Au terme de ce processus la pharmacopée sera réduite à moins de 250 substances fin 2010. C’est donc essentiellement sur ce reliquat que s’appliquerait la diminution de 50 % projetée. Ce genre de politique fragilise la protection et accroît le risque de résistances.
C'est ce qui s'est passé au Danemark où, au terme d’une politique d’éviction, ce pays, auparavant autosuffisant en blés panifiables, en importe aujourd’hui la quasi-totalité et ne produit plus que des blés fourragers et du maïs destinés à l’alimentation animale, moins exigeants en produits de protection.
Les normes de qualité relatives à la présence de mycotoxines (toxines hautement cancérigènes produites par des champignons parasites) dans les produits alimentaires entrent actuellement en vigueur. Elles peuvent affecter les céréales et le maïs bien au-delà de 10 % de la production nationale.
L’intensification des travaux mécaniques voire le recours à des sarclages manuels pour remplacer le désherbage chimique, des réfactions à la récolte, une augmentation des pertes au transport, la moindre tenue des produits frais à l’étalage, impacteraient les coûts alimentaires et toucherait d’abord les fruits et légumes, productions fragiles dont les nutritionnistes conseillent au Français, pour leur santé, d’augmenter la consommation.
Une surenchère purement nationale conduisant à éliminer un grand nombre de substances ayant satisfait par ailleurs aux normes européennes – les plus sévères au monde – amènera à délocaliser ces productions vers d’autres pays de l’Union ou du monde.
Or, dans tous les pays développés, les enquêtes sur les résidus dans les produits frais montrent des taux de dépassement plus élevés sur les produits importés, très souvent en raison des différences de réglementation d’un pays à l’autre. Le nombre de cas de dépassement devrait donc s’accroître.
Avec la croissance des échanges intercontinentaux, la pression des organismes nuisibles est en constante évolution. Pour les seuls ravageurs des cultures, quarante-et-une espèces nouvelles ont été introduites sur le territoire français entre janvier 2000 et juin 2005. Cette mondialisation du parasitisme nécessite de maintenir disponible une gamme de produits diversifiés pour faire face à des situations imprévues.
La difficulté d’obtenir l’autorisation pour de nouveaux produits de protection des plantes et les coûts de la recherche ont beaucoup ralenti la création de nouveaux moyens ces dernières années. En 2000, les industriels estimaient qu’amener sur le marché une seule substance active coûtait aux alentours de 184 millions de dollars US et signalaient le net ralentissement de l’innovation depuis cinq ans.
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