Escherichia coli est une bactérie qui colonise l’intestin de nombreux animaux à sang chaud. La très grande majorité des souches de ce germe sont d'inoffensives commensales des espèces dont elles sont les hôtes, mais quelques unes sont à l’origine de maladies très graves, qui peuvent être mortelles.
Hier soir dimanche, la souche virulente d’Escherichia coli responsable d’hémorragies intestinales, transmise par la consommation de concombres originaires d'Espagne, a fait au moins dix morts en Allemagne.
Le nombre de personnes infectées a augmenté au cours du week-end, avec au moins 467 cas d'infections intestinales pour la seule ville de Hambourg, dont 91 cas, plus graves, de syndrome hémolytique et urémique.
Des cas sont déclarés dans d’autres pays de l’union européenne, dont trois en France.
Le système d’alerte mis en place par l’Union européenne, très performant, a permis de remonter aux exploitations agricoles d’où sont originaires les lots de concombres incriminés. Les deux exploitations sous serres en causes, situées en Andalousie, ont été interdites de commercialisation.
Ce qu’en France on a peu entendu dans les media et peu lu dans la presse, c’est que ces deux exploitations produisaient en agriculture biologique.
Hier soir, Le Monde, par exemple, n’en avait toujours pas informé ses lecteurs. Faut-il croire que l'idée que des produits « bio » puissent tuer des consommateurs exerce sur les journalistes un effet de sidération aussi puissant que l'affaire DSK sur l'opinion publique ?
Pour l’instant, les autorités espagnoles défendent la réputation des produits nationaux en arguant que ces concombres ont pu être contaminés en aval des exploitations d’origine, dans la chaîne de transport et de commercialisation, ce qui n'est pas exclu.
Il est néanmoins bien connu des professionnels qu’en production légumière, plus spécialement pour les légumes qui trainent par terre, comme les cucurbitacées, les épinards ou certaines salades, le risque de contamination par des germes d’origine fécale est accru en agriculture biologique, où seuls les engrais organiques, la merde, quoi, pour parler clair, sont autorisés.
En 2005, aux États-Unis, un épisode à Escherichia coli virulentes, transmises par des épinards « bio », a été responsable d’un décès, de vingt-trois cas d’insuffisance rénale et de plus de cent cinquante hospitalisations.
D’autres risques sanitaires accrus en production biologique sont bien documentés, notamment la présence de toxines naturelles produites par les champignons parasites insuffisamment éliminés par les méthodes biologiques. Il s’agit notamment des aflatoxines, hautement cancérigènes, fréquemment détectées dans les céréales et les arachides, ou des patulines, dans les pommes et les jus de pommes, responsables pour leur part de lésions congestives graves des poumons, des reins et de la rate ainsi que d'atteintes nerveuses et de paralysies.
Il ne sera pas question dans cet article des pesticides, sinon pour dire,
- d’une part, qu’en agriculture conventionnelle, les résidus sont absolument sans danger pour la santé des consommateurs, compte tenu de la réglementation fixant les doses journalières admissibles (DJA) et du dispositif de contrôle mis en place dans l’Union européenne,
- d’autre part, que contrairement à ce qu’on fait croire à l’opinion, l’agriculture biologique fait elle aussi appel à des pesticides qui, pour être naturels*, n’en ont pas moins des inconvénients pour la santé.
* Et encore ! La bouillie bordelaise est-elle un produit naturel ?
Ma conclusion
Les produits de l'agriculture biologique ne sont peut-être pas plus dangereux que ceux de l'agriculture conventionnelle mais, ce qui est certain, c'est qu'ils ne le sont pas moins.
Je pense que « les allégations santé » qui consistent à faire croire que les produits « bio » sont plus sains ou ont de meilleures qualités nutritionnelles que les produits issus de l’agriculture conventionnelle est une des plus vastes arnaques à la consommation des temps modernes.
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